Si deux figures sont obtenues en disposant les mêmes pièces d'un tangram, elles ont évidemment même aire.
Le théorème de Bolyai affirme qu'il suffit que deux polygones aient même aire pour qu'il existe un jeu de pièces polygonales qui permette d'obtenir par recollement l'un ou l'autre des polygones. La démonstration de ce théorème est un peu longue mais assez élémentaire ; elle donne des méthodes de découpage. Dans les
cas particuliers
, on cherchera des solutions plus élégantes.
Ce document accompagne une partie du cours de géométrie de la
licence scientifique générale (L3 pour des futurs professeurs des écoles à l'université Paris-Sud)
.
Il a pour but d'illustrer par des figures colorées et mobiles la notion d'équivalence par découpage et recollement et la démonstration du théorème de Bolyai. La démonstration est écrite en détail dans
le livre de Daniel PERRIN, Mathématiques d'école, nombres, mesures et géométrie (Editions Cassini).
On consultera avec profit Aires et volumes : découpage et recollement (I), un article de Daniel Perrin en ligne sur Images des Mathématiques, CNRS. Les figures mobiles utilisent Geogebra que vous devez autoriser à les afficher.
Quelques exercices
Dans chaque cas, on précisera comment le découpage est obtenu et on justifiera le recollement.
Proposer un découpage d'un carré permettant d'obtenir par recollement deux carrés de même aire.
Proposer un découpage d'un carré de côté
permettant d'obtenir par recollement deux carrés de côtés
et
.
Proposer un découpage d'un rectangle permettant d'obtenir par recollement un carré.
Proposer un découpage d'un carré permettant d'obtenir par recollement trois carrés de même aire.
Proposer un découpage de trois carrés de même aire permettant d'obtenir par recollement un carré.
Trois variantes d'un même problème :
Découper un carré pour obtenir par recollement 5 carrés de même aire.
Avec 5 carreaux de céramique identiques, carreler un grand carré.
Transformer une croix rouge en carré en deux coups de ciseaux.
Un calisson a la forme d'un losange formé de deux triangles équilatéraux dont on notera
la longueur du côté. Ranger des calissons dans une boîte de la forme d'un calisson de côté
puis dans une boîte de forme hexagonale de côté
puis de côté
.
Proposer un découpage d'un hexagone (resp. pentagone) en deux hexagones (resp. pentagones).
Proposer un découpage d'un triangle équilatéral (resp. hexagone régulier) en trois triangles équilatéraux (resp. hexagones réguliers).
Problème du pâtissier
Un pâtissier a un moule de forme un triangle
scalène c'est-à-dire vraiment quelconque, sans symétrie particulière
dont il connaît la longueur des côtés. Il prépare une tarte triangulaire dont les côtés ont les bonnes longueurs.
Quand il cherche à mettre sa tarte dans le moule, il se rend compte qu'il ne peut pas mettre la tarte
directement dans le moule. Sa tarte est symétrique du moule.
Comment mettre la tarte dans le moule ?
On peut retourner la tarte dans le moule, les fruits au fond,
ou découper la tarte et placer les morceaux fruits au-dessus dans le moule.
Le pâtissier connaît le théorème de Bolyai donc il sait que la deuxième méthode est possible.
Proposez une solution à quatre morceaux et une à trois seulement.
Découpage et recollement de polygones
On dit que deux polygones
et
sont équivalents (sous-entendu par découpage et recollement)
si on peut écrire
comme une réunion presque disjointe d'un nombre fini
de polygones
,
...
et
comme une réunion presque disjointe d'un nombre fini
de polygones
,
...
tels que
pour tout
, le polygone
soit directement isométrique à
. On note alors
.
Exemple : Le pentagone est équivalent au trapèze.
Propriétés
Deux polygones équivalents ont même aire.
Deux polygones directement isométriques sont équivalents
La relation "être équivalents par découpage et recollement" est une relation d'équivalence.
(3) signifie que ~ vérifie trois propriétés :
la réflexivité :
la symétrie :
implique
la transitivité explicitée
ici
est la clé de la démonstration du théorème de Bolyai.
Transitivité
La relation "être équivalent par découpage et recollement" est transitive, c'est-à-dire si
est équivalent à
et
équivalent à
alors
est équivalent à
.
Ici, on a trouvé un découpage du carré
qui permet d'obtenir le rectangle
par recollement et un découpage du triangle
qui permet d'obtenir le rectangle
par recollement. Comme
et
ont même aire les rectangles
et
, de largeur 1, ont même longueur, ils sont isométriques. En superposant le découpage rouge et le découpage bleu de
, on obtient un découpage vert de
en morceaux plus nombreux qui permettent d'obtenir par recollement soit
, soit
.
Théorème de Bolyai
Théorème (Bolyai, 1832).
Deux polygones
et
de même aire sont équivalents par découpage et recollement.
La démonstration assez longue utilise sans cesse la
transitivité
de la relation ~ puisque par étape on passe d'un polygone
à un rectangle
équivalent à
dont un côté a pour longueur l'unité. Les découpages utilisés sont exemplaires de la méthode mais dans les exercices on s'attachera à produire des découpages en peu de pièces.
Remarque: Ce résultat ne se généralise pas aux volumes. En général, deux polyèdres de même volume ne sont pas équivalents par découpage et recollement. Pour plus de détails, consulter Aires et volumes : découpage et recollement (II), un article de Daniel Perrin en ligne sur Images des Mathématiques, CNRS.
Démonstration
Etapes de la démonstration du Théorème de Bolyai :
Soit
un polygone quelconque. Il existe un rectangle
équivalent à
dont un côté a pour longueur l'unité.
Ce lemme implique le théorème de Bolyai en effet si
et
sont de même aire, ils seront équivalents par découpage et recollement l'un à
, l'autre à
. Or comme
et
ont un côté de longueur l'unité et sont de même aire, ils sont isométriques donc équivalents. Par transitivité
et
le seront aussi.
C'est le cas illustré dans la présentation de la
transitivité
de la relation ~ .
Du polygone au triangle
Si on peut trouver un découpage de n'importe quel triangle qui permette d'obtenir par recollement un rectangle dont un côté est de longueur 1, on pourra le faire pour tout polygone. En effet, on peut découper tout polygone en triangles. Il suffit donc de montrer le lemme fondamental pour les triangles.
Du triangle au parallélogramme
Lemme
Soit
un triangle, il existe un parallélogramme
équivalent à
par découpage et recollement.
On découpe le triangle
selon la droite des milieux
et on fait tourner le petit triangle rouge
autour du point
en déplaçant le point
. Le découpage de
en deux parties permet d'obtenir par recollement le parallélogramme
.
Sur la figure, bouger le point
change l'allure du triangle
.
Du parallèlogramme au rectangle
Voici la dernière étape qui amène au rectangle de côté 1 annoncé dans le
lemme fondamental.
Soit un parallélogramme
tel que
est égal à l'unité. Alors
est équivalent à un rectangle de côté 1.
Il est plus ou moins immédiat de découper
pour obtenir un rectangle en gardant un côté de longueur
:
Figure dans le
cas favorable
et figure dans le
cas défavorable
.
cas favorable
Si le pied de la hauteur se trouve sur le côté
, il est simple de découper le parallélogramme pour obtenir un rectangle de côté l'unité.
En utilisant le point mobile
, déplacez le triangle
pour transformer le parallélogramme en un rectangle.
cas défavorable
Si le pied de la hauteur du parallélogramme
ne se trouve pas sur le côté
, on découpe, par des droites parallèles à
, le parallélogramme en tranches suffisamment petites afin de pouvoir transformer chaque petit parallélogramme en un rectangle comme dans le
cas favorable
.
Faites-le en déplaçant les points
,
,
et
.
Il suffit ensuite d'empiler les rectangles obtenus en un rectangle de côté l'unité. Faites-le en déplaçant les points
,
,
et
.